Les fluctuations de la politique : Le cas du ministre Ismaïla Madior Fall et la CENA

Les décisions politiques et les positions des acteurs politiques sont souvent soumises à des évolutions inattendues, des revirements qui peuvent laisser perplexes les observateurs. Récemment, une situation intrigante a émergé au Sénégal concernant le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, et sa position sur la Commission électorale nationale autonome (CENA).

En 2011, alors que le président Abdoulaye Wade était au pouvoir, Ismaïla Madior Fall soutenait avec fermeté la pérennité des membres de la CENA. Il affirmait que ces membres, une fois nommés, ne pouvaient plus être révoqués de leurs fonctions. Cette déclaration émanait d’une étude éditée par AfriMAP et Open Society Initiative for West Africa (Osiwa), où le ministre de la Justice plaidait en faveur de la stabilité de la CENA en tant qu’institution autonome.

Pourtant, en 2023, une situation apparemment contradictoire est apparue. Le président Macky Sall a signé un décret limogeant tous les membres de la CENA pour ensuite nommer de nouveaux membres. Ce geste est en nette opposition à la position défendue par Ismaïla Madior Fall en 2011. Une question légitime se pose : pourquoi ce changement radical dans la position du ministre de la Justice ? 

Il est essentiel de reconnaître que les décisions politiques sont souvent influencées par des facteurs multiples, notamment des considérations politiques, des priorités changeantes, ou des contextes en évolution. Le revirement d’Ismaïla Madior Fall peut être interprété comme une réponse aux circonstances politiques actuelles, où le président Macky Sall a choisi de remplacer les membres de la CENA à quelques mois seulement des élections présidentielles. Cela peut être vu comme une tentative de consolider le pouvoir exécutif sur l’organe de supervision des élections.

Cependant, l’histoire de la CENA nous rappelle la nécessité de débattre de la stabilité institutionnelle en matière électorale. En 2011, Ismaïla Madior Fall plaidait pour la permanence de la CENA en tant qu’institution autonome, la protégeant des influences politiques temporaires. En 2023, la réalité est tout autre, avec la dissolution de fait de la CENA et la nomination de nouveaux membres.

Ce revirement soulève des questions essentielles sur la nécessité de garantir la stabilité des organes de supervision électorale, indépendamment des majorités politiques en place. Est-il temps de réfléchir à la constitutionnalisation de la CENA, afin de la protéger de l’instabilité politique et de préserver son indépendance ?

La situation du ministre Ismaïla Madior Fall et de la CENA est un exemple frappant des vicissitudes de la politique, mais elle nous rappelle également la pertinence de discuter de la manière dont les institutions électorales sont conçues et protégées pour garantir l’intégrité du processus démocratique. Le débat doit se poursuivre pour trouver un équilibre entre la stabilité institutionnelle et la flexibilité nécessaire pour répondre aux besoins changeants de la société.

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